Ambassadrices de la médiation

  • 29 août 2014
  • Stéphane Champagne, Chambre des notaires du Québec

Mes Danielle Beausoleil et Dominique Lettre sont des chantres de la médiation. Les deux notaires représentent la Chambre au sein du Comité des organismes accréditeurs en médiation familiale (COAMF). Cet organisme, qui fête ses 20 ans, joue un rôle de premier plan dans la médiation au Québec. Surtout dans la foulée du nouveau Code de procédure civile. Une occasion à saisir pour les notaires, croient les deux juristes.

Une plus grande déjudiciarisation des conflits, n’est-ce pas ce que souhaitent la plupart des gens ? Or, la médiation familiale est l’un des meilleurs outils permettant d’atteindre cet objectif. Même si cette approche gagne en popularité et est fortement encouragée par le ministère de la Justice, bien des notaires hésitent à se spécialiser dans ce domaine.

« Le Code de procédure civile (la loi instituant ce nouveau Code a récemment été adoptée, mais elle n’entrera en vigueur qu’à l’automne 2015 – NDLR) met l'emphase sur tous les modes alternatifs de règlement des différends, qu'il s'agisse de médiation familiale, de médiation civile ou d'arbitrage. Ceci s'inscrit dans la volonté du Ministère de désengorger les tribunaux, de permettre une meilleure accessibilité à la justice et de responsabiliser le citoyen dans la recherche de ses propres solutions. Les notaires, juristes de l'entente, devraient prendre cette place. Pourquoi ne la prennent-ils pas ? Ils ont pourtant la cote d’amour du public. » 

Mes Danielle Beausoleil et Dominique LettreSelon Me Danielle Beausoleil, il y a actuellement quelque 800 médiateurs accrédités au Québec, dont environ 400 avocats et 250 notaires. Le taux de réussite de la médiation étant d’environ 85 %, la notaire croit elle aussi qu’un plus grand nombre de ses pairs devraient suivre une formation pour être accrédités.

Devenir médiateur nécessite une formation de base de 60 heures, suivie d’une formation complémentaire, de même que la réalisation de 10 dossiers sous la supervision d’un médiateur d’expérience. Ce type de supervision, Dominique Lettre et Danielle Beausoleil l’ont fait pendant des années. Me Lettre continue de le faire encore régulièrement.

« Être accrédité permet d’avoir une corde de plus à son arc. Cela ouvre de nouvelles perspectives sur le plan humain. En même temps, la médiation permet aussi de faire de la vente croisée. Si vous recevez quelqu’un dans le cadre d’une médiation, ce sera un client qui risque fort de vous solliciter pour d’autres types de services, notamment le transfert ou le refinancement d’une hypothèque, la mise à jour du testament, etc. », mentionne Me Lettre.

Les deux expertes, qui font de la médiation depuis une vingtaine d’années, estiment qu'il est difficile, pour un notaire, d'axer sa pratique exclusivement sur la médiation. « La médiation est un long processus où il faut en connaître le plus possible sur son client. Je dis qu’il faut être un saint pour faire cela à plein temps », croit Me Beausoleil.

« C'est une discipline qui demande beaucoup d'écoute, d'empathie, de disponibilité et d'habiletés de communication. Il s'agit d'un domaine de pratique exigeant, mais énormément gratifiant. Cela représente environ 60 % de ma pratique », explique Dominique Lettre. Cette dernière enseigne la médiation à l’Université de Sherbrooke. Me Lettre souligne d’ailleurs qu’une courte formation est désormais offerte dans le nouveau programme de maîtrise en droit notarial, lequel remplacera dès cette année le diplôme de droit notarial (DDN).

Pour les deux juristes, le rôle du COAMF est donc plus pertinent que jamais. L'objectif principal du Comité des organismes accréditeurs, tel que décrit sur son site Web, est la collaboration entre les ordres professionnels en ce qui a trait à la formation des médiateurs, la promotion de la médiation, la déontologie et le développement général de la médiation familiale au Québec et de faire des recommandations en ce qui a trait à ces matières.

Le Comité des organismes accréditeurs, est-il écrit, s'assure d'une interprétation et de l’application concordante de la législation en matière de médiation familiale, particulièrement en ce qui a trait aux conditions et au processus d'accréditation.

Les organismes pouvant accréditer un médiateur en vertu de la loi sont : le Barreau du Québec, la Chambre des notaires du Québec, la Corporation professionnelle des conseillers et conseillères d'orientation du Québec, la Corporation professionnelle des psychologues du Québec, la Corporation professionnelle des travailleurs sociaux du Québec, l’Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec, de même que l'Association des centres jeunesse du Québec, qui agit à titre de représentante des établissements qui exploitent un Centre de protection de l'enfance et de la jeunesse.

Parmi les réalisations importantes du COAMF au cours des dernières années : élaboration d’une formation sur le dépistage de la violence ; reconnaissance de la Journée québécoise de la médiation familiale qui se tient le premier février de chaque année ; développement de la « Séance d’information sur la parentalité après la rupture », laquelle est devenue obligatoire pour les parents qui se séparent et qui veulent recourir aux tribunaux pour régler leurs différends.

Ce faisant, la médiation occupe une place de plus en plus importante dans la société québécoise. « On est envié ailleurs dans le monde. Il n’y a pas d’autres endroits où la médiation se développe comme ici. La force du COAMF résulte d’une pensée multidisciplinaire qui ne fait qu’enrichir la cause de la médiation au Québec », conclut Danielle Beausoleil.