Le notariat haïtien l’a échappé belle

  • 22 avril 2014
  • Stéphane Champagne, collaborateur spécial pour la Chambre des notaires du Québec

La coopération internationale a permis de soulager le peuple haïtien au lendemain du terrible séisme de 2010. Mais elle a aussi fortement ébranlé le notariat de la Perle des Antilles. N’eût été l’intervention des notaires d’origine haïtienne Marie-Alice Bélisaire et Lesly Alphonse, la profession aurait pu s’en trouver sérieusement compromise. L’Entracte a rencontré ces deux juristes hors du commun qui étaient de passage au Québec en mars dernier afin de recevoir l’aide de la Chambre des notaires pour la mise en place d’un ordre professionnel dans leur pays.

Il va sans dire que le tremblement de terre du 12 janvier 2010 à Haïti a nécessité l’intervention massive des ONG de partout dans le monde. Or, il se trouve que, dans leur hâte de remettre le pays sur pied, certains de ces organismes ont voulu contourner les règles en suggérant notamment de balayer les notaires du revers de la main afin, soutenaient-ils, d’accélérer le processus de reconstruction.

« On nous reprochait de coûter cher, de tout ralentir. On menaçait de nous remplacer par un organisme. Sous la pression des ONG, la quasi-totalité de Port-au-Prince a fait l’objet d’un arrêté d’expropriation pour cause d’utilité publique. Nous avons décidé de nous lever, de mobiliser les notaires afin de colmater les brèches », explique Marie-Alice Bélisaire, notaire.

Heureusement, l’arrêté d’expropriation a été révoqué par le gouvernement et les ONG en cause n’ont pas eu raison du notariat haïtien. Ces événements ont toutefois servi de bougie d’allumage à un processus de restructuration de la profession. Dans la foulée, Marie-Alice Bélisaire et Lesly Alphonse ont fondé le Syndicat des notaires des juridictions d’Haïti, dont ils sont respectivement présidente et vice-président. Ce syndicat regroupe 174 des quelque 337 notaires haïtiens.

Le tandem souhaite aller encore plus loin en créant un ordre professionnel inspiré du modèle de la Chambre des notaires du Québec. Le président de l’Ordre, Me Jean Lambert, a pris contact avec les notaires haïtiens. Il s’est rendu dans les Antilles en décembre 2013 dans le cadre d’un voyage exploratoire cautionné par l’Union internationale du notariat (UINL), dont Haïti fait partie depuis 1948.

Comme Me Lambert en a fait état dans l’Entracte de janvier 2014, les notaires haïtiens partent de loin. Marie-Alice Bélisaire et Lesly Alphonse le reconnaissent. Par exemple, la situation cadastrale et la gestion des titres de propriété sont dans un état lamentable. En fait, 90 % du territoire n’est pas cadastré, « et les autres 10 % ne correspondent pas à la réalité », affirme sans ambages M. Alphonse.

Ils signalent un autre problème : il n’y a pas de structure de gouvernance ni de programme pour assurer la relève. Aussi, les notaires sont mal répartis dans le pays (trop à un endroit ; pas assez à un autre). Fait à noter : le nombre de notaires à Haïti est limité par un numerus clausus. Bref, on peut être nommé notaire seulement lorsqu’il y a une place qui se libère.

Qu’à cela ne tienne, les deux émissaires haïtiens ne ménageront aucun effort, disent-ils, afin de redonner au notariat de leur pays ses lettres de noblesse. D’ailleurs, leur séjour dans la Belle Province, durant lequel ils ont participé aux Cours de perfectionnement du notariat à Québec, n’a été financé par aucun organisme. Il est payé de leur poche.

Selon Marie-Alice Bélisaire, la mise en place de ce qu’il sera convenu d’appeler « la Chambre notariale d’Haïti » sera une bénédiction. « Un ordre professionnel, dit-elle, va servir à rassembler les troupes, à structurer la profession, à assurer la protection du public, à assurer la formation continue de nos membres, à ouvrir de nouveaux champs de compétence et, donc, à assurer la pérennité du notariat à Haïti. »

Pour l’heure, les deux représentants du Syndicat des notaires des juridictions d’Haïti planchent sur différents projets. Ils ont ainsi entrepris le recensement des notaires du pays et un annuaire papier et électronique verra le jour sous peu. Une conférence du Syndicat, un congrès national, de même qu’une deuxième édition de l’université notariale sont dans le collimateur.

Contrairement à ce que certains pourraient croire, 60 % des Haïtiens sont titulaires de droits de propriété. Avec ses 27 500 km2 (soit environ l’équivalent du Bas-St-Laurent), Haïti est donc un pays de propriétaires. « Mais la plupart des gens n’ont pas de titres. Et bien souvent, ils ont quitté leur propriété pour venir vivre en ville. Ce sont d’autres gens qui occupent leur terre », explique Lesly Alphonse.

Selon

Comme Me Lambert en a fait état dans l’Entracte de janvier 2014, les notaires haïtiens partent de loin. Marie-Alice Bélisaire et Lesly Alphonse le reconnaissent. Par exemple, la situation cadastrale et la gestion des titres de propriété sont dans un état lamentable. En fait, 90 % du territoire n’est pas cadastré, « et les autres 10 % ne correspondent pas à la réalité », affirme sans ambages M. Alphonse.

Ils signalent un autre problème : il n’y a pas de structure de gouvernance ni de programme pour assurer la relève. Aussi, les notaires sont mal répartis dans le pays (trop à un endroit ; pas assez à un autre). Fait à noter : le nombre de notaires à Haïti est limité par un numerus clausus. Bref, on peut être nommé notaire seulement lorsqu’il y a une place qui se libère.

Qu’à cela ne tienne, les deux émissaires haïtiens ne ménageront aucun effort, disent-ils, afin de redonner au notariat de leur pays ses lettres de noblesse. D’ailleurs, leur séjour dans la Belle Province, durant lequel ils ont participé aux Cours de perfectionnement du notariat à Québec, n’a été financé par aucun organisme. Il est payé de leur poche.

Selon Marie-Alice Bélisaire, la mise en place de ce qu’il sera convenu d’appeler « la Chambre notariale d’Haïti » sera une bénédiction. « Un ordre professionnel, dit-elle, va servir à rassembler les troupes, à structurer la profession, à assurer la protection du public, à assurer la formation continue de nos membres, à ouvrir de nouveaux champs de compétence et, donc, à assurer la pérennité du notariat à Haïti. »

Pour l’heure, les deux représentants du Syndicat des notaires des juridictions d’Haïti planchent sur différents projets. Ils ont ainsi entrepris le recensement des notaires du pays et un annuaire papier et électronique verra le jour sous peu. Une conférence du Syndicat, un congrès national, de même qu’une deuxième édition de l’université notariale sont dans le collimateur.

Contrairement à ce que certains pourraient croire, 60 % des Haïtiens sont titulaires de droits de propriété. Avec ses 27 500 km2 (soit environ l’équivalent du Bas-St-Laurent), Haïti est donc un pays de propriétaires. « Mais la plupart des gens n’ont pas de titres. Et bien souvent, ils ont quitté leur propriété pour venir vivre en ville. Ce sont d’autres gens qui occupent leur terre », explique Lesly Alphonse.

Selon Me Johanne Delage, directrice générale adjointe, développement de la profession à la Chambre des notaires du Québec, la collaboration avec les notaires haïtiens va bon train. « Nous sommes en phase exploratoire. Mais c’est évident que nous allons les aider là où ils veulent aller. Nous avons toute l’expérience nécessaire pour les appuyer », dit-elle.
 

Des chiffres

10,4
Population d’Haïti (en millions)

60 %
Pourcentage de la population haïtienne qui détient un droit de propriété

70 %
Pourcentage de la population haïtienne dans la tranche d’âge des 17 à 35 ans

337
Nombre approximatif de notaires à Haïti

760
Revenu disponible par habitant (en dollars)

27 500
Superficie, en km carrés, d’Haïti

Source : Banque mondiale (2012) et Syndicat des notaires des juridictions d’Haïti

, directrice générale adjointe, développement de la profession à la Chambre des notaires du Québec, la collaboration avec les notaires haïtiens va bon train. « Nous sommes en phase exploratoire. Mais c’est évident que nous allons les aider là où ils veulent aller. Nous avons toute l’expérience nécessaire pour les appuyer », dit-elle.

Des chiffres

10,4

Population d’Haïti (en millions)

60 %
Pourcentage de la population haïtienne qui détient un droit de propriété

70 %
Pourcentage de la population haïtienne dans la tranche d’âge des 17 à 35 ans

337
Nombre approximatif de notaires à Haïti

760
Revenu disponible par habitant (en dollars)

27 500
Superficie, en km carrés, d’Haïti

Source : Banque mondiale (2012) et Syndicat des notaires des juridictions d’Haïti